Un public plus adulte
De façon surprenante, lorsque l’exposition du “BillyBoy* Nouveau Théâtre de la Mode” fit le tour de la France dans le Train Magique des Jouets de Mattel, puis ensuite le tour des plus grandes villes des USA, dévoilant les passionnantes créations des couturiers et des créateurs, ces prototypes ne furent pas exposés. BillyBoy* avait à l’époque l’idée et même la certitude que Mattel le suivrait dans ses idées et voulait les garder de coté en attendant.
La plupart de ces prototypes égalent, si ce n’est surpassent, certaines des meilleures créations réalisées à cette époque par les couturiers et créateurs pour Barbie, modèles qui figurent en grande partie dans son livre “Barbie, Her life and Times” CROWN PUBLISHERS, New York) (“Barbie, Sa Vie, son Epoque, Edita, Lausanne). A ce sujet, il importe de mentionner que de nombreux créateurs et couturiers ne figurent pas dans le livre parce que leurs modèles arrivèrent trop tard pour figurer à temps dans le livre. Ils feront tous l’objet d’une publication prochaine.
Ces prototypes de Barbie, sophistiqués et réalistes s’adressent de toute évidence à un public plus adulte. Du fait de leur précision ou de leur complexité, il est évident que beaucoup d’entre eux seraient relativement difficiles à produire en série. Mais dans leur principe ils étaient indiscutablement prémonitoires, car Barbie quelques années plus tard fut radicalement recentrée sur une mode plus adulte, également ciblée pour plaire à un public de collectionneurs adultes, lorsqu’enfin le message de BillyBoy* fut compris.
Véritable visionnaire et créateur inspiré, BillyBoy* ne fut pas pas seulement le passeur d’idées nouvelles qui furent exploitées, de façon phénoménale quelques années après dans la production industrielle des poupées, mais il a également suscité une émulation sans précédent dans la communauté des collectionneurs de poupées, et bien évidement des marchands. Non seulement par sa pertinente et intelligente approche de l’histoire de Barbie et de l’impact publicitaire colossal de l’exposition du “BillyBoy* Nouveau Théatre de la Mode” en France et en Amérique, mais aussi et surtout, à partir de 1989, par la création de sa propre poupée Mdvanii qui fut bien la première poupée de mode pour adultes et que BillyBoy* créa pour répondre à son besoin de s’exprimer librement et totalement dans ce domaine. De fait, il est très intéressant d’étudier ses prototypes de Barbie comme une anticipation de son propre travail sur Mdvanii, quelles que soient les différences - fondamentales - qui existent entre Mdvanii et Barbie. Les collectionneurs de Barbie d’aujourd’hui et certainement de toutes les poupées mannequins apparues après 1989 sont redevables de cette possibilité à BillyBoy*, à ses idées innovatrices, à sa persévérance et à sa vision.
Biographie(s) officielle(s)
On ne peut oublier de rappeler qu’Andy Warhol lui-même a créé le fameux portrait de Barbie à la suggestion de BillyBoy*, ce qu'il mentionne dans ses Diaries. Andy Warhol n'aurait probablement jamais peint Barbie si BillyBoy*, à qui il avait proposé à plusieurs reprises de faire le portrait, ne lui avait pas dis "Si tu veux faire mon portrait, peins Barbie parce que Barbie, c'est moi". Il lui suggéra donc de faire le portrait de Barbie, paraphrasant Flaubert et son “Emma Bovary, c’est moi”. De fait, c'est grâce à cette boutade que l'on peut désormais assimiler ce portait aux autres icônes de la pop culture américaine, telles que Marylin et Liz Taylor, icônes glamour s’il en est. Warhol réalisa donc ce portrait et fit cadeau du premier réalisé en “Bleu BillyBoy* ” à BillyBoy*, Mattel ayant commissionné (à la suggestion de BillyBoy*) un rouge de la même taille (il en existerait un exemplaire en jaune qui aurait disparu et dont la Fondation Warhol ne garde aucune trace). A propos de l'image qui lui servit pour faire ce tableau, Warhol déclare dans ses Diaries qu'il trouve que Barbie "a un problème", à cause de ce sourire bouche ouverte et qu'il aurait préféré peindre une Barbie vinage des années cinquante voir (citation en bas de page). Dans le coffret luxueux consacré par Barbie pour ses 50 ans (Editions Assouline) on y lit le mot de Warhol "I love plastic (J'adore le plastique)" sorti de son contexte, récupéré comme s'il s'adressait à Barbie, alors que le nom de BillyBoy*, à qui l'on doit ce tableau et l'idée même de faire habiller Barbie par des couturiers et créateurs - idée reprise dans ce livre plus de vingt années après avec des créateurs n'ayant pas participé au BillyBoy* Nouveau Théatre de la Mode pour la plupart- n'y est pas même mentionné. Curieusement on y trouve en illustration le portrait de Barbie sur fond rose, alors qu'il n'existe pas en cette version.
En dépit d'une presse internationale phénoménale qui salua l'initiative de BillyBoy* et l'immense succès de cette exposition itinérante, en France comme aux USA, malgré la reconnaissance unanime de professionnels et de célébrité (voir en marge), sans oublier les très nombreux livres consacrés à Barbie depuis et après le succès du best seller de BillyBoy*, qui tous reconnaissent et saluent l’influence du travail de BillyBoy* dans ce domaine, la biographie officielle de Mattel concernant Barbie a choisi jusqu'à ce jour de ne pas mentionner son nom et de passer à la trappe l’ensemble de toutes ses réalisations pour Barbie et de son association avec Mattel.On y lit aussi qu'Oscar de La Renta fut le premier créateur à apposer son nom sur des créations pour Barbie, alors qu’en fait celle-çi vinrent après la Barbie “BillyBoy* Nouveau Théâtre de la Mode”. BillyBoy* fut sans contestation possible le premier créateur associé à Barbie et à avoir son nom apposé sur sa boite. On ne peut que s’étonner devant une pareille amnésie, aussi inexplicable qu'injuste. La politique commerciale est une chose, la vérité en est une autre: on peut toujours réécrire l'histoire mais elle refait toujours surface d'une manière ou d'une autre, et aujourd'hui plus que jamais avec internet.
Ces prototypes de Barbie furent enfermés dans des malles pendant plus de dix années et ne virent le jour que lorsque BillyBoy* décida de les revoir et de faire connaître leur existence, dont cet article sur le site de la Fondation Tanagra se fait le passeur. Une partie d'entre elles furent représentées par Betty de Stefano à Bruxelles, pour le plus grand bonheur des collectionneurs. Ce fut avec joie et émotion que nous les revîmes après toutes ces années. C’est aussi un grand plaisir de savoir qu’elles commenceront une nouvelle vie et apporteront, à travers le monde, leur message de paix, de beauté et d'humour. Elles sont retournées dans leurs boites, en attendant, peut-être, leur publication intégrale dans un livre et qui sait, une exposition...
© 2001/2013, Lala Jean Pierre Lestrade
Remerciements à Betty de Stefano, Stanislas Huaux, Thierry Hefti.